27/01/2008
J’ai fait une vraie grasse mat : réveil à 7h45. Je traine un peu au casse-croûte et pour ranger mes bricoles ; la douche est tiède, tendance froide, vu que ce sont des chauffe-eaux solaires qui l’alimentent et qu’il n’arrête pas de pleuvoir…
J’erre en ville. Elle est typique des villes sur lesquelles tombent la modernisation à la chinoise. D’une part, la nouvelle ville se construit autour de larges avenues à six voies de circulation, se coupant à angle droit, et, le long, des habitations neuves poussent dans des styles parfois audacieux : toute une avenue style anglo-hollandais, larges fenêtres à petits carreaux, toits pointus de tuiles rouges. Pour la vieille ville, on en est encore à mi-chemin du processus. Elle a été percée par deux rues perpendiculaires. La première, surement la plus ancienne, a été bordée d’immeubles au style salle de bain (c’est le nom que je donne à ces façades en béton recouvertes de carrelage blanc, ou jaune pâle, bleu pâle, parfois rose…) et hébergeant des banques, des administrations et beaucoup de commerces. L’autre rue, plus récente, au pavement tout neuf (trottoir et caniveau) a été bordée de maisons neuves, mais à l’ancienne façon chinoise : façades d’un étage, peintes en chaux avec bordures en pierres volcaniques taillées, toits à tuiles rondes, fenêtres aux encadrements ouvragés. Les rez de chaussée sont occupés par des magasins à la mode – éclairés flashy, des coiffeurs branches, marchands de CD de musique d’aujourd’hui, etc.

Cette rue n’a pas été percée entièrement, ce qui fait qu’elle est prolongée par l’ancienne, une ruelle tordue aux paves inégaux, bordée de maisons en bois déglinguées, aux toits troués recouverts de bâches, où quelques échoppes vendent des bricoles à deux sous.
Quant aux quartiers entre ces deux rues, ils sont en voie de démolition, les uns après les autres. D’énormes tractopelles y sont à l’œuvre. Surement des projets immobiliers comme ceux dont j’ai vu la maquette hier.
Vers midi, je décide d’aller visiter un village ancien des environs (Heshun 和顺) et qui a été quasiment préservé depuis plus d’un siècle. J’attends un bon moment qu’un minivan passe, et, comme rien ne vient, je pars à pied pour 4 km, accompagné par un gars qui en a aussi marre d’attendre. On discute un peu sans pouvoir échanger de paroles ; il arrive à me dire qu’il a décidé de m’accompagner, qu’il pleut, que les pavés du bord de la route sont des pierres volcaniques (il fait des grands gestes imitant un volcan), que, là-bas, il y a une grande cascade (gestes), et que le village qu’on voit au loin est très ancien. Il essaie aussi de m’expliquer aussi comment resquiller l’entrée de 50 Y en faisant des grands gestes, me montrant la voie par les champs, mais je n’ai compris son intention que bien après…
Le vieux village est très harmonieux (peu de constructions “salle de bain”), un réseau de petites ruelles, avec les portiques d’entrée des habitations anciennes, un jeu de couleur entre les pavés sombres, le bas des murs en pierres volcaniques noires, l’autre partie en torchis ocre pale, et le tout surmonte de tuiles luisantes sous la pluie. Les gens sourient en me voyant rentrer chez eux. Quelques maisons de notables transformées en bibliothèques ou en ateliers de calligraphie : dans l’une d’elles, une magnifique collection de bois et de pierres à imprimerie antiques sculptées avec minutie.
Au bout d’une ruelle, des sons de cloches parviennent d’un temple habité par des moines bouddhistes qui récitent des prières lorsque des “clients” arrivent. La plupart de ces maisons sont habitées par des gens du cru, pas très riches, mais, apparemment, il y a des gens fortunés qui s’y installent pour y passer leur retraite. Il y a une auberge de jeunesse, 20Y le lit en dortoir de 4, et 70Y la chambre+sdb.
Je trouve un minivan pour renter à Tengchong (bavardage avec une touriste de Pékin qui a visité Paris – « c’est très beau, tranquille et il y a beaucoup d’arts ! ». Je reprends un autre minivan pour aller à la Mer Chaude (热海) : c’est un endroit réputé pour ses sources chaudes (96°) et ses mini geysers, à une douzaine de km au sud. La visite coute 40 Y et consiste en un sentier de 2 km qui serpente en boucle au profond d’une vallée étroite, au torrent abondant et boueux (forcement, il n’arrête pas de pleuvoir…).
Il y a le long de ce chemin des émanations de vapeurs, des bouillonnements d’eau, des piscines naturelles et un petit geyser qui, sans discontinuer, envoie trois jets d’eau bouillante à deux mètres. Cette source s’appelle “la bouche de la grenouille” ce qui est une bonne trouvaille car les précipités ont formé trois cônes et, à leur sommet, comme des lèvres desquelles sortent les jets. Entre ces sources, des établissements thermaux de luxe (un bain = 128Y !) proposent aussi un forfait bain + repas cuit à la vapeur sortie des sources ! Un restaurant de luxe avec nappes immaculées et verres en Crystal domine la vallée et quelques grosses limousines aux vitres noires sont garées devant. D’autres bâtiments en construction laissent présager un avenir prospère. Mais le bâtiment “ People’s House for Thermal therapy” est délabré et envahi par les plantes, et est fermé au public. Le long du chemin, il y a quelques rares visiteurs, empressés sous la pluie, s’arrêtant juste le temps de la photo “moi devant les sources”.
A la sortie du parc, il n’y a pas de minivans pour rentrer. J’entreprends de marcher sur la route, plutôt que de tourner en rond sur le parking : il y a 10 km d’ici le centre-ville. Je tente le stop. Deux cars remplis de curistes passent, les passagers me regardant comme une curiosité, puis une voiture noire, puis un 4×4 d’une administration quelconque. Je vois qu’au bout de 200 m, le 4×4 s’arrête et le conducteur me fait des grands signes, j’arrive en courant, on se serre à l’arrière. On essaye d’échanger, mais les gars sont peu bavards…
On me laisse en ville où je fais quelques achats. Je ne trouve pas de restaurant dont la devanture n’est pas ouverte en plein vent sur la rue et qui, par ailleurs, dispose de table individuelle : les tables sont grandes pour une dizaine de convives, et comme on est dimanche, les familles les occupent toutes et font la fête.
Quitte à manger dans les courants d’air, je rentre à l’hôtel qui dispose d’un coin repas. Les jeunes me demandent ce que je souhaite : je montre dans la vitrine réfrigérante un morceau de bœuf fumé/séché, puis dans le bac à légumes, une aubergine et deux pommes de terre. Ils les donnent à la cuisinière et me demandent comment les cuisiner ; je leur réponds – comme pour vous. Je prends place à une table basse avec une bière ; en face une jeune femme allaite son bébé à côté d’une bassine remplie de braises (la température est en baisse). 10 mn après, j’ai sur la table une assiette de bœuf rissolé au gingembre et au piment, une énorme assiette de pommes de terre râpées cuites avec des cives et une énorme assiette d’aubergines en tranches cuites avec des tomates et de l’ail, et un saladier rempli de riz fumant ! Le tout pour 24 Y ! Retour dans la chambre, le ventre bien rempli vers 20h ; mais les plombs sautent une heure après !!! Je dors sous deux couettes et une couverture.