19/01/2008
Ce matin, il pleut. Et le haut des montagnes qui entourent la vallée, est recouvert de neige. Le gars de Shanghai est au rendez-vous, mais il faut tout de même attendre jusqu’à 9 h pour avoir un bus pour Bing zhong luo 丙中洛.
Le bus, de taille modeste, part et circule lentement en ville pour récupérer quelques clients, puis va dans un genre de garage pour vérifier si ses freins fonctionnent bien… Utile précaution car la route remonte la vallée dont les versants tombent à pic dans la rivière. Les voitures doivent attendre dans des passages plus larges pour se croiser. La rivière fait quelques méandres vertigineux. Il pleut, et il neige sur les hauteurs qu’on distingue de moins en moins. On arrive au bout de deux heures dans un endroit qui fut un ancien lac aujourd’hui disparu à la suite de l’érosion du verrou qui le bloquait. Le bus s’arrête à un guichet dans ce qui est un parc naturel et où je dois payer 50Y l’entrée. La rivière décrit un large méandre presque complet, et elle fait un beau ruban bleu entourant des prairies vertes et brunes. Il y a quelques cultures et des pâturages.
On arrive au bourg qui est un rassemblement de maisons en béton (uniquement des commerces) le long d’une large rue. On distingue dans la brume quelques villages traditionnels sur les hauteurs. On s’installe dans un hôtel, on mange une soupe, puis on part à pied sur la route qui se prolonge au nord dans la vallée. A cet endroit, on est à une dizaine de km de la province du Tibet vers le nord.
Il pleut. J’ai sorti le Kway, le parapluie et la casquette ! La route se transforme rapidement en piste, boueuse par endroit, et il n’y a pratiquement pas de circulation. Quelques rares piétons s’empressent avec des sacs plastique sur la tête. Une camionnette s’arrête à nos signes et nous emmène sur 3 km, jusqu’à un endroit où les falaises des deux rives tombent à pic dans la rivière sur plusieurs centaines de mètres. La route a été creusée dans la falaise. A ce moment, le gars de Shanghai qui n’arrêtait pas de téléphoner, me demande si je suis d’accord qu’un véhicule nous amène dans les villages qui sont au bout de cette piste à une vingtaine de km de là pour la somme de 350 Y à partager en 2. Bon, pourquoi pas. En fait, cette affaire s’est révélée être une belle arnaque, car on n’a fait avec ce véhicule, un 4×4 de luxe, qu’une quinzaine de km à tout casser. C’était difficile pour moi de râler auprès du chauffeur qui parlait à peine le chinois, mais j’ai expliqué au gars de Shanghai ce que j’en pensais… Malgré cet incident, je me fais plaisir en allant dans un village isolé que j’avais vu depuis la route sur la rive d’en face.
C’est une belle promenade (2 h) malgré la pluie et ce désagrément, car je suis superbement accueilli par les villageois. Dans une famille, on m’a offert un verre d’alcool de riz. Après renseignements, ce village s’appelle Omli, et il est habité par des Lu. Leurs habitations sont en rondins de bois, assemblés un peu comme les isbas. Les toits sont recouverts d’ardoises. Près de la rivière, des paysannes font de la farine de maïs dans des moulins à meules de pierre actionnés par la force de l’eau. Ce village, au pied des falaises, est entouré par quelques champs en pente, où pousse du blé naissant.
Le gars de Shanghai n’a pas voulu venir, car il pleuvait trop selon lui, ce qui fait qu’il a passé le plus clair de son temps à bavarder avec le chauffeur…

Sur une pierre, il y a de curieuses inscriptions composées de lettres romaines, mais à l’envers ou disposées de travers, et à les lire, ça ne donne aucune sonorité cohérente. Il parait que ce sont les Luxi qui se sont appropriés l’alphabet romain, trimballé ici par les missionnaires au 19ème siècle, et qui l’ont utilisé un peu en désordre… Il y a aussi ce genre d’inscription sur les églises, car ici on est plutôt chrétien.
Mais il y a aussi un stûpa tibétain recouvert de plaques d’ardoise gravées d’inscriptions en sanscrit. Mais, du peu que je sache, il n’y a plus guère de tibétains dans cette partie de la vallée, bien que cette rivière prenne sa source au Tibet.
De retour au bourg, où il pleut toujours, le chauffeur a dû comprendre que quelque chose n’allait pas : il nous offre de partager le repas en famille (fort bon) arrosé d’alcool de riz, et il nous offre aussi la connexion internet (ici, il n’y en a pas d’autres) ! Vu la pluie abondante, mes rêves de traverser la montagne pour rallier le Mékong par les chemins de montagne et qui est à 30 km à vol d’oiseau, se sont envolés. Demain retour à Liu Ku, puis bus de nuit pour Kunming. Je réfléchis à la suite, probablement dans le Guizhou, province à 300 km à l’est de Kunming.